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DOSSIER DE PRESSE – « Il est urgent de changer de politique agricole !»

POURQUOI IL EST URGENT DE CHANGER DE POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

 

Dossier de presse – Journée d’été des écologistes – Pantin, Août 2020

 

La Politique agricole commune (PAC) est le cadre réglementaire européen qui organise l’accompagnement des agriculteurs au sein de l’Union européenne. Avec ses 68 milliards d’euros annuels, c’est le deuxième plus important budget et la dernière politique intégrée de l’Union européenne. Révisée tous les 7 ans, une proposition de réforme sera soumise au vote des députés européens au début de l’automne 2020.

 

Pour Benoît Biteau, député écologiste européen, la réforme proposée ne répond ni aux besoins des agriculteurs, ni aux préoccupations des citoyens. Rappelons les enjeux en quelques chiffres :

 

  • Rémunération des agriculteurs : en 2017, 1 agriculteur français sur 5 ne s’est pas versé de salaire ; c’est presque 1 sur 3 pour les éleveurs.
  • Démographie agricole : 50% des agriculteurs ont disparu en 30 ans, 1/3 des agriculteurs français ont plus de 55 ans, – 34% d’installations d’agriculteurs français en 20 ans.
  • Transparence & contrôle démocratique : Victor Orban (Premier Ministre de Hongrie) et Andrej Babis (Premier ministre tchèque) sont soupçonnés de détournement de fonds publics et de corruption par une enquête du New York Times. Andrej Babis aurait détourné plus de 35 millions d’euros d’aides PAC en 2018 via une de ses entreprises.
  • Dérèglement climatique : l’agriculture est responsable d’environ 25% des émissions de GES (i.e. flatulences et éructation des bovins, déjections des élevages et riziculture irriguée, déforestation, utilisation de biocides (pesticides, engrais de synthèse) émetteurs de GES et destructeurs de puits de carbone.
  • Biodiversité : depuis 1990, les populations d’oiseaux des champs et de papillons des prairies ont diminué de plus de 30 %.

 

Lors des Journées d’Été des écologistes à la Cité fertile de Pantin, Benoît Biteau interviendra au sein de l’atelier « Eau & Agriculture : appropriation d’un bien commun et conflits d’usage » avec Joëlle Lallemand, Présidente de l’APIEEE & ex-chercheuse à l’INRA. Ce débat a eu lieu Samedi 21 Août entre 15h30 et 16h30 et est en replay en cliquant ici.

 

Ce débat intervient dans un contexte particulièrement préoccupant marqué par la sécheresse et les pénuries d’eau, l’explosion mortelle d’engrais de synthèse à Beyrouth et le renoncement du gouvernement à l’interdiction des néonicotinoïdes (voir plus de détails dans le dossier complet).

 

Le vote sur la réforme de la PAC intervient dans un contexte particulièrement préoccupant et marqué par la sécheresse et les pénuries d’eau, l’explosion mortelle d’engrais de synthèse à Beyrouth et le renoncement du gouvernement à l’interdiction des néonicotinoïdes. Ces actualités nous rappellent l’urgence de réformer la PAC pour aboutir à une gestion durable de la ressource en eau, faire de l’agriculture un levier contre l’effondrement de la biodiversité et prévenir les risques (sanitaires et industriels) liés à l’utilisation de produits chimiques dans l’agriculture.

 

1 – S’adapter aux sécheresses et prévenir le dérèglement climatique

 

Cette année, comme tous les ans depuis plusieurs années maintenant, l’eau manque dans de nombreux départements de France : les nappes phréatiques et les cours d’eau s’assèchent conduisant les préfets à prendre des arrêtés pour limiter l’usage de l’eau.

Si ces arrêtés sont nécessaires en temps de pénuries pour éviter les ruptures d’eau, ils sont toutefois loin de résoudre le problème à la source. La raréfaction et la dégradation de la qualité de l’eau sont des enjeux majeurs et structurels auxquels il est urgent de proposer des réponses.

 

Jusqu’à maintenant, le gouvernement n’a su proposer que des mesures curatives, répondant à l’immédiateté des problèmes, sans jamais interroger leur efficacité économique et écologique sur le moyen terme. Les mesures d’accompagnement d’urgence annoncées par le Ministre de Normandie, aussi nécessaires soient-elles pour éviter l’effondrement de la profession, ne visent qu’à dédommager financièrement les agriculteurs aux maigres récoltes liées à l’absence d’eau. Le gouvernement ne tire aucun enseignement de la répétition des épisodes caniculaires et se contente de pallier les manques à gagner.

 

Or, avec le dérèglement climatique toujours plus avancé année après année, les aléas climatiques sont amenés à se répéter. Il est donc urgent d’accompagner les agriculteurs dans la transition de leurs exploitations pour les rendre moins vulnérables aux aléas climatiques et moins gourmandes en eau. Nous n’avons ni le temps ni les moyens de financer avec de l’argent public des mesures à impact limité dans le temps.  Il est urgent de revoir l’organisation de la gouvernance de la ressource en eau pour prévenir et adapter l’agriculture aux situations de pénuries d’eau.

 

Le modèle agricole actuel, parce qu’il encourage notamment la culture de céréales (comme le maïs) très gourmandes en eau en été, est un facteur de dégradation de la quantité et de la qualité de la ressource en eau. Si les techniques d’irrigation et de stockage de l’eau doivent faire partie des solutions pour l’agriculture de demain, il est parfaitement irréaliste d’imaginer qu’elles sont les premières réponses à apporter à l’enjeu de l’eau. Par exemple, les projets gigantesques de bassines agricoles en Charente Maritime s’illustrent par leur absence de réflexion globale sur leur impact sur l’eau et sur les milieux. Ces bassines servent à arroser du maïs, cultivé à grand renfort d’engrais de synthèse et de pesticides, destiné à l’exportation via le Port de La Pallice pour engraisser des herbivores sensés se nourrir d’herbe. C’est l’exemple parfait d’une réponse onéreuse et mal-conçue, qui en plus de ne pas régler le problème de la raréfaction de l’eau, contribue à la dégradation durable des milieux.

 

2 – Adopter des méthodes agroécologiques pour améliorer la résilience des cultures via la préservation de la biodiversité

 

Ce mois-ci, par la voix de Barbara Pompili, le gouvernement a autorisé les agriculteurs des Hauts-de-France cultivateurs de betteraves à utiliser des néonicotinoïdes pour, selon eux, les aider à faire face à la jaunisse virale. Cette décision, en plus d’être parfaitement inefficace pour sauver les cultures de betteraves, est extrêmement dangereuse à long terme pour la biodiversité.

 

Les néonicotinoïdes appliqués aujourd’hui sur les cultures de betteraves ne sauveront pas la récolte ; ils traiteront seulement les cultures futures contre les pucerons. Choisir cette solution pour lutter contre la jaunisse virale à court terme n’a aucun sens.

 

L’impact de ce traitement sera cependant bien réel et prolongé dans le temps pour la biodiversité. Les substances actives des néonicotinoïdes persistent dans le sol et dans l’eau, et migrent dans les tissus (graines, fruits etc…) des plantes. Par exemple, si des tournesols sont semés après la récolte de betteraves traités aux néonicotinoïdes, les tournesols seront contaminés dans tous leurs tissus, ce qui empoisonnera inévitablement les abeilles qui viendront butiner.

 

L’invasion de pucerons est une conséquence du dérèglement climatique. La prolifération des pucerons en plein été n’est pas un phénomène normal car il devrait se produire en automne. La prolifération prématurée est due à l’absence de gel en hiver, sensé régulé les populations de pucerons. Plus les hivers seront chauds, plus des épisodes de ce genre se produiront.

 

Face à ces nouveaux enjeux, malheureusement amenés à se répéter, les pratiques agricoles doivent s’adapter durablement. Les produits chimiques qui servent à traiter les cultures éradiquent les prédateurs de certains nuisibles comme les pucerons. Plutôt que d’aider les écosystèmes à s’équilibrer, les produits phyto-sanitaires les détruisent. La réponse chimique à un problème écosystémique appelle la réponse chimique à un problème d’absence d’écosystème.

 

Il est urgent de sortir de ce cercle vicieux et de promouvoir des solutions agronomiques basées sur la nature et l’étude du fonctionnement des écosystèmes. 

 

3 – Développer une culture du risque de l’agriculture chimique

 

Après l’explosion mortelle du stock de nitrate d’ammonium à Beyrouth, il est impossible de rester immobiles face aux dangers que représente l’utilisation de produits de synthèse en agriculture. Si nous savions déjà que ces produits avaient des impacts à long terme sur la santé des agriculteurs, des riverains, des sols et de la biodiversité, l’accident de Beyrouth nous rappelle que l’utilisation de ces produits fait également peser des risques imminents à tous ceux qui travaillent en amont de l’épandage.

 

Ces produits circulent dans tous les ports du monde, y compris en France, dans des conditions opaques. La transparence sur les flux des ports de commerce doit être totale pour permettre un contrôle démocratique et une politique de gestion des risques adaptée.

 

D’autant que ce n’est pas la première fois dans l’histoire que le choix de l’agriculture chimique cause des accidents industriels. En 1984, la catastrophe de Bhopal en Inde était également liée à la fabrication de pesticides. Combien de Bhopal ou de Beyrouth faudra-t-il pour abandonner l’usage des engrais et pesticides de synthèse ?

 

Seule l’agriculture biologique permet de nous affranchir collectivement de ces risques mortels, imminents ou de moyen terme.

 

 

La PAC, levier pour répondre à ces enjeux

 

La PAC actuelle et la copie de sa réforme bientôt soumise aux députés européens ne prennent pas en compte les trois enjeux que sont la gestion durable de la ressource en eau, la restauration massive des écosystèmes biologiques et l’intégration du risque imminent (explosion) et de moyen terme (santé, biodiversité) induit par l’utilisation d’engrais de synthèse et de pesticides.

 

Pour prévenir efficacement sur ces trois enjeux, la nouvelle PAC doit se structurer sur deux axes fondamentaux :

  • « Rémunérons à l’unité de main d’œuvre plutôt que de subventionner à l’hectare ». La subvention à l’hectare est contraire à tous les enjeux auxquels l’agriculture fait face aujourd’hui. Elle encourage l’agrandissement des structures plutôt que de favoriser l’emploi et l’installation, développe les solutions technico-chimiques plutôt que le savoir agronomique de l’étude des écosystèmes, incite à la culture de céréales pour l’élevage plutôt qu’à la sauvegarde d’espaces de biodiversité par les troupeaux etc… Pour inverser la tendance, il suffirait pourtant de changer le critère principal de redistribution : rémunérer par nombres d’emplois sur une structure.
  • « Conditionnons la rémunération des agriculteurs aux services rendus pour la création d’espaces de résilience ». La sauvegarde et la restauration des écosystèmes ne doit plus être une option ; elle doit être au cœur du système de rémunération des agriculteurs tant son rôle est grand pour la durabilité de la souveraineté alimentaire européenne. L’équilibre et la richesse des écosystèmes sont des clefs stratégiques pour la stabilité de l’Union européenne et du monde. Cette éco-conditionnalité doit s’accompagner d’aides massives à l’installation en agroécologie pour permettre la bascule.

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