Nous assistons depuis le début de la semaine de plénière à une situation ubuesque. Le vote sur la politique agricole commune (PAC) agite le Parlement européen et le Conseil des ministres. Tous s’accordent pour que rien ne change dans les textes, mais en communiquant sur des mesures prétendument révolutionnaires capables de masquer la vacuité écologique de cette réforme qui conditionnera l’avenir de l’agriculture jusqu’en 2030. Un exercice de greenwashing bien rodé, auquel ministres, lobbies de l’agrobusiness et députés européens se livrent dans une décomplexion qui laisse sans voix.
Du côté Parlement européen, le PPE, RENEW et les S&D sont à la manœuvre. Une semaine avant le vote sur la réforme, ils se sont mis d’accord sur des amendements de compromis, en prenant soin d’exclure des discussions tous les autres groupes. Lundi soir, à 21h, le Parlement européen a accepté par la voix de son Président David Sassoli d’anticiper le vote sur la PAC d’une demi-journée, ce qui d’après nos informations est contraire au règlement de cette assemblée.
Cette décision était capitale, non pas pour la démocratie et le débat sur ce texte, mais pour servi les intérêts du Conseil des Ministres qui se réunissait le mardi soir. En ayant connaissance de la position du Parlement sur des points centraux, ils leur étaient plus facile de finaliser un compromis.
Dès le mercredi matin, les Ministres européens de l’Agriculture, ainsi que les députés européens des trois groupes politiques (PPE, RENEW et S&D – en France, Les Républicains et En Marche – les Socialistes français étant marginalisés dans leur groupe), pouvaient commencer à communiquer sur des mesures présentées comme révolutionnaires permettant à la PAC de s’aligner avec les engagements de l’Union européenne (Green Deal) et du monde (Accords de Paris).
En réalité, les textes votés disent une toute autre réalité que ce qui figure dans les éléments de langage diffusés par les ministres.
La PAC passe complètement à côté des enjeux de la décennie : le revenu des paysans, le climat, la biodiversité, la souveraineté alimentaire, les générations futures, la lutte contre la corruption. Nous perdons 10 ans, la honte !