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Retraites agricoles : le système est nocif, changeons-le !

Le député européen Benoit Biteau (Verts) plaide pour un changement en profondeur du système de retraite des agriculteurs : « tel qu’il est construit, il détruit l’emploi agricole et accélère la désertification des zones rurales ».

 

La réforme des retraites imposée par Mme Borne provoque une opposition forte et unie. L’allongement des durées de cotisations, le report de l’âge de la retraite ou encore l’absence de prise en compte de la pénibilité sont inacceptables. D’autres pistes comme la baisse du plafond des allocations les plus élevées, l’augmentation des cotisations et la taxation plus importante des revenus du capital, ne sont même pas explorées. Les rares améliorations proposées, comme un revenu équivalent à 85 % du SMIC, ne bénéficieront qu’à un bien petit nombre de personnes.

 

Personne ou presque (1) ne s’inquiète des retraites des paysans. Le système particulier mis en place en 1952 avec la bénédiction de la FNSEA est pourtant particulièrement injuste pour les paysans, destructeur pour le monde rural et coûteux pour la société.

 

En 1946, les dirigeants paysans ont privilégié un régime de retraite à part du régime général. Ils ne voyaient pas pourquoi ils participeraient à la solidarité nationale et soutiendraient les pensions des salariés et des ouvriers. Ils ne souhaitaient pas plus soutenir les petits paysans des zones d’élevage. Ceux qui avaient les moyens ont capitalisé tout au long de leur vie, acheté des terres et se sont agrandis. Pour les autres, la pauvreté est restée la norme et s’est accentuée avec la vieillesse. Au fil des réformes, le système singulier de la MSA (2) a été rafistolé. Il a conservé la même logique de capitalisation individuelle. Les exploitants agricoles qui captent des aides importantes de la PAC (3) investissent dans la terre ou l’immobilier. Ils se constituent un bas de laine qui leur assure des années de tranquillité. Pour les autres, la moyenne des retraites agricoles versées est de 760 € par mois, en dessous du seuil de pauvreté. La misère est toujours bien présente dans des campagnes de plus en plus désertes et reculées.

 

Structurellement déficitaire

Les dégâts ne se limitent pas à condamner définitivement les petits paysans retraités à la grande pauvreté. Tel qu’il est construit, ce système détruit l’emploi agricole et accélère la désertification des zones rurales. Au lieu de payer des cotisations sociales plus élevées, ceux qui le peuvent investissent lourdement. À mesure qu’elles s’agrandissent, les exploitations agricoles deviennent hors de prix, et les jeunes ne peuvent pas les racheter. Elles sont découpées en lot et reprises par les plus gros des voisins. Paradoxalement, ce sont les petites fermes en agriculture paysanne qui sont le plus facilement reprises, car elles ont privilégié le développement de l’emploi plutôt que la course à l’agrandissement et à l’achat de matériel hors de prix.

Le régime des retraites agricoles est structurellement et définitivement déficitaire. Vu la pyramide des âges, les paysans en activité ne seront plus jamais assez nombreux pour payer les retraites de leurs prédécesseurs. C’est la collectivité dans son ensemble qui renfloue chaque année un système qui laisse de nombreux paysans et surtout paysannes retraitées dans des situations de pauvreté et de dépendance indignes d’une démocratie riche comme la nôtre. Selon les chiffres de la MSA, en « 2019, le régime agricole a reçu 5,4 milliards d’euros dont 4,4 milliards proviennent du régime général. »

Il y a urgence à arrêter ce régime d’une autre époque qui ne profite qu’à quelques-uns et à intégrer les paysans et les salariés agricoles dans le système général. Nous y gagnerons presque tous.

(1) Seule la revalorisation marginale des non-salarié(e)s agricoles, souvent les conjointes, est entérinée par l’Assemblée nationale et le Sénat. (2) Mutuelle Sociale Agricole (MSA). (3) Politique Agricole Commune (PAC).

 

Tribune à retrouver sur Ouest-france.fr 

 

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